Deux lettres de 1878 à Mgr Place

1) Du 1er février 1878

Conclusion du Mémoire réfutant dix griefs soulevés contre lui, à l’époque de l’affaire du ciboire offert par Pie IX. En effet, le 30 août 1877, le Pape remet à Mgr Mercurelli un magnifique ciboire à expédier à Timon-David à titre d’encouragement. Le 30 septembre, ce ciboire est réceptionné solennellement en grande pompe. Pour ceci, Mgr Place infligera un blâme au Père pour avoir fait cette réception en « cappa magna » et en ajoutant aux insignes de son canonicat marseillais la croix d’or des chanoines d’Avignon.

« Quelque jour, mieux éclairé, Monseigneur, vous saurez quels sont vos vrais amis ou ceux qui dans la sincérité de leur foi, respectent toujours quand même le caractère sacré et l’autorité éminente de leur Evêque, tout en défendant le respect et l’indépendance de leur personnalité, ou ceux qui, toujours souples et rampants, sont toujours les plus acharnés à vous attaquer à Marseille et à Rome quand ils peuvent le faire sans danger. Mgr de Mazenod, avec la grande expérience de son âge, disait qu’en rendant un service, il faisait 99 mécontents et un ingrat, et sa mort l’a bien prouvé. Vous n’êtes pas exposé à cela avec ceux qui ne vous demandent rien que cette sympathie que vous devez à tous vos prêtres, mais surtout qui ont épuisé leur vie à faire quelque bien dans votre diocèse.

Revenez nous donc, Monseigneur, vous savez que c’est le désir plusieurs fois exprimé du Saint-Père, celui des meilleurs catholiques de votre ville. Faites cesser cette anomalie d’un pauvre prêtre approuvé de tous, mais désapprouvé de son Evêque. Vous n’en trouverez aucun plus disposé à vous prodiguer les marques les plus sincères du respect, du dévouement et de l’affection les plus absolus. Je suis, avec un profond respect, etc… »

Copie v. 45 p. 943

2) Toute dernière lettre, du 20 juillet 1878, à Mgr Place déjà désigné comme archevêque de Rennes.

« A peine ai je appris avec certitude votre départ de Marseille, je me suis présenté à l’évêché, où on m’a dit que vous ne receviez pas. Ne sachant si je pourrais trouver l’occasion de vous rencontrer, laissez moi vous dire, Monseigneur, avec quelle peine j’ai appris votre résolution. Nul ne vous regrettera plus que moi, et parce que vous étiez depuis longtemps mon Evêque, et parce que vous avez été l’instrument des desseins de Dieu sur moi, et surtout parce qu’en vous perdant, je perds l’espoir auquel je n’avais jamais renoncé de reconquérir enfin votre affection.

Ce que je vous écris en ce moment est l’expression des vrais sentiments de mon coeur, et je suis d’autant plus heureux de vous le dire que mes regrets sont désormais plus désintéressés. De près comme de loin, je vénérerai toujours votre personne sacrée, et si, pour la première fois, je regrette de n’avoir pas eu place dans vos conseils, c’est qu’il me semble que j’eusse tout fait pour empêcher votre départ.

Avant ce moment, Monseigneur, veuillez me dire que vous me bénissez, moi, mes frères et mes enfants, et que vous n’emportez aucune rancune contre nous. Laissez moi espérer que si jamais je viens à Rennes, où j’ai des amis, vous voudrez bien encore m’ouvrir vos bras et votre coeur.

Je prierai Dieu de toute mon âme qu’il bénisse votre nouveau ministère, tout en regrettant que vous l’ayez accepté ; et si la triste nature du coeur humain laisse derrière vous des ingrats, soyez assuré que vous ne rencontrerez jamais parmi eux celui qui se dit avec le plus profond respect, etc…

J. Timon David »

Copie v. 45 pp. 953-954